4. Nourrir


Le chien adulte est un utilisateur important de graisses comme source d'énergie et peut résister de fait à un jeûne prolongé, jusqu'à 3 semaines, sans manifestation d'hypoglycémie. A l'inverse, le chiot nouveau-né, surtout âgé de moins de 5 jours et a fortiori chétif ou prématuré, ne dispose d'aucune réserve et son potentiel d'enzymes indispensables à la néoglucogenèse est insuffisant : privé de l'apport ombilical, il doit impérativement ajuster sa glycémie avec la nutrition intermittente qu'il reçoit.

Le lait de la mère constitue bien sûr le meilleur aliment du jeune chiot, encore faut-il que la production lactée soit suffisante et de bonne qualité (voir plus loin le " Syndrome du lait toxique "). Lors de portées nombreuses, si la chienne a peu de lait, en cas de stress ou sur des chiots orphelins, les risques d'hypoglycémie chez le chiot seront fréquents : hypothermie, faiblesse, impossibilité de téter, pleurs permanents, puis épuisement de l'animal et installation d'une bradycardie associée à une respiration irrégulière, des convulsions puis le coma. Lors d'hypoglycémie, la mise en place d'un traitement vétérinaire sera indispensable.

De même que la perte de poids ne doit pas dépasser 10 % le premier jour, on aura recours à l'allaitement artificiel si le chiot n'a toujours pas pris de poids le deuxième jour. On estime ainsi le gain de poids normal journalier chez le chiot à 2 g par kg de poids anticipé de l'adulte (ex. si l'adulte pèse 10 kg, le gain pondéral quotidien sera de 20 g pour le chiot).

a) L'intubation gastrique
Quand la mère présente une mammite ou que la lactation est insuffisante à assurer les besoins de toute la portée, il est nécessaire d'allaiter artificiellement les chiots. Pour l'éleveur, l'intubation gastrique est une technique rapide et facile à mettre en œuvre (l'utilisation du biberon est généralement trop contraignante en termes de durée des soins pour l'ensemble d'une portée ; 10 à 15 minutes par biberon contre 1 à 2 minute en moyenne par intubation) :

  • il faut au préalable vérifier la longueur du tube pour que son extrémité parvienne dans l'estomac sans risque de perforation ; la seringue est remplie et l'air qui peut s'y trouver est expulsé ;
  • le chiot est tenu horizontalement, la tête en extension dans le prolongement du corps (mais pas relevée), de manière à ce que le tube glisse dans l'œsophage ; l'introduction doit être faite doucement, sans forcer ; quelques gouttes de lait sur le tube peuvent servir de lubrifiant ; (attention, le lait doit être distribué tiède ~ 37/38°C) ;
  •  le contenu de la seringue est injecté dans l'estomac de façon progressive et sans brutalité ; une légère résistance signifie que l'estomac est plein ; à titre indicatif, le volume de l'estomac d'un chiot représente environ 5 % de son poids corporel (un chiot de 500 g pourra ingérer 25 ml de lait) ;
  •  l'opération sera renouvelée quatre fois par jour.

En cas de défaillance maternelle, l'éleveur devra également stimuler l'excrétion fécale en frottant la région anale avec un morceau de coton humidifie.


b) Importance du colostrum
Chez le chiot, le rôle protecteur des anticorps (les immunoglobulines) est encore plus important pendant les premières semaines : 95 % des immunoglobulines sont apportés par le colostrum.

Les immunoglobulines maternelles échappent à la digestion du fait de l'immaturité relative des processus enzymatiques chez le chiot, mais aussi parce que le colostrum lui-même contient des inhibiteurs des enzymes digérant les protéines. Les immunoglobulines sont ainsi absorbées intactes par l'intestin grêle néonatal.

Ce phénomène étant limité à quelques jours, voire quelques heures, il est souhaitable que le chiot ingère suffisamment de colostrum dans les premières 36 heures.

Le colostrum semble également jouer un rôle important par l'apport de facteurs de croissance favorisant le développement et l'équipement enzymatique de la muqueuse intestinale dans les 5 premiers jours de vie.

Lorsque la production maternelle fait défaut, il est possible d'administrer du colostrum congelé. On veillera alors à respecter des conditions d'hygiène rigoureuses : si la muqueuse de l'intestin grêle est perméable aux immunoglobulines, elle l'est également à de nombreuses molécules, voire des virus ou des bactéries.